Festival BACH de lausanne
Baroque Academy

Commentaire – Concert 7

Dancing on the Lute est un voyage musical qui nous invite à découvrir l’univers sonore fascinant et raffiné du théorbe et de la guitare baroque au cœur de l’Europe du XVIIe et du début du XVIIIe siècle. À travers des danses, des préludes, des chaconnes, des passacaglias et des morceaux populaires, le programme trace une carte des émotions et des styles qui révèle la diversité et la richesse de la musique écrite pour ces instruments. Des cours françaises de Louis XIV aux palais italiens et aux cours espagnoles, chaque œuvre choisie offre une vision vivante de l’esprit d’une époque où l’intime et le théâtral, le savant et le populaire cohabitaient en harmonie.

Le théorbe, avec sa silhouette imposante et sa voix délicate, était un instrument très apprécié dans la musique du début du baroque, notamment pour accompagner la voix et comme soliste dans des répertoires empreints d’une grande liberté expressive. De son côté, la guitare baroque, plus légère et plus brillante, a trouvé dans le répertoire espagnol et italien un terrain fertile pour le développement d’une musique virtuose, rythmée et profondément liée au langage de la danse.

Le répertoire français pour théorbe est représenté par l’un de ses plus grands représentants: Robert de Visée (vers 1650 – 1733), musicien à la cour de Louis XIV. Ses suites combinent des danses de cour et de petits préludes dans un style raffiné, mélancolique et équilibré. Des œuvres telles que Les Sylvains de M. Couperin révèlent une sensibilité exquise pour les nuances timbrales et un lien étroit entre la musique pour cordes pincées et la tradition du clavecin et de la danse française.

En Italie, le théorbe a trouvé sa voix la plus innovante chez des compositeurs tels que Giovanni Girolamo Kapsberger (1580 – 1651), musicien à l’esprit inquiet et à l’imagination débordante. Ses toccatas, passacaglias et canarios se distinguent par leur liberté formelle et leur audace harmonique, et nous permettent d’entrevoir une esthétique presque improvisée, où le geste rythmique et la résonance occupent une place prépondérante. À ses côtés, Alessandro Piccinini (1566 – 1638), d’une génération précédente, représente un équilibre plus renaissance et sophistiqué. Ses Partite variate sopra la Romanesca révèlent un goût pour la variation et l’ornementation, avec un lyrisme élégant et structuré qui contraste avec l’expressivité plus abrupte de Kapsberger.

Le répertoire pour guitare baroque se déploie avec une grande variété entre l’Espagne et l’Italie. Dans le domaine espagnol, deux figures essentielles se distinguent: Gaspar Sanz (1640 – 1710) et Santiago de Murcia (1673 – 1739). Sanz, auteur du célèbre traité Instrucción de música sobre la guitarra española (Instruction musicale sur la guitare espagnole), nous lègue un répertoire plein de saveur populaire, où résonnent des danses telles que les Jácaras, les Mariçapalos ou les Hachas, avec leur mélange unique de grâce rythmique et de rusticité raffinée. Murcia, qui fut guitariste de la reine Marie-Louise de Savoie, porte cet héritage vers une plus grande sophistication, avec des œuvres telles que ses Gallardas, qui explorent de nouvelles possibilités harmoniques et timbrales, sans perdre leur caractère festif et vital.

En Italie, la guitare baroque s’épanouit entre les mains de compositeurs tels que Francesco Corbetta (vers 1615 – 1681), Giovanni Paolo Foscarini (vers 1600 – 1647), Angelo Michele Bartolotti (¿? – vers 1682) et Giovanni Battista Granata (1620/1621 – 1687). Corbetta était l’une des grandes figures internationales de son temps, et son style, influencé par la France, l’Italie et même l’Espagne, se caractérise par sa richesse harmonique et son utilisation intensive du rasgueado. Sa Passacaglia sopra la B ou ses Folías reflètent une virtuosité brillante, mais toujours au service de l’expression. Foscarini, Granata et Bartolotti, quant à eux, combinent de manière innovante les textures du battuto (rasgueado) et du pizzicato (punteado), créant des contrastes rythmiques et timbriques qui remplissent la musique d’énergie et d’intensité sonore.